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que les maux dont gémit l’empire dérivent principalement des défiances qu’inspire la conduite des chefs du pouvoir exécutif, dans une guerre entreprise en son nom contre la constitution et contre l’indépendance nationale ; que ces défiances ont provoqué de toutes les parties de l’empire le vœu de la révocation de l’autorité confiée à Louis XVI ; considérant néanmoins que le corps législatif ne veut agrandir par aucune usurpation sa propre autorité, et qu’il ne peut concilier son serment à la constitution et sa ferme volonté de sauver la liberté qu’en faisant appel à la souveraineté du peuple, décrète ce qui suit :

» Le peuple français est invité à former une Convention nationale ;

» Le chef du pouvoir exécutif est provisoirement suspendu de ses fonctions ; un décret sera proposé dans la journée sur la nomination d’un gouverneur du prince royal ;

» Le payement de la liste civile est suspendu ;

» Le roi et sa famille demeureront dans l’enceinte du Corps législatif jusqu’à ce que le calme soit rétabli dans Paris ; le département fera préparer le Luxembourg pour sa résidence, sous la garde des citoyens. »

Ce décret fut adopté sans discussion. Le roi l’entendit sans étonnement et sans douleur. Au moment du vote, il s’adressa au député Coustard, placé au-dessus de la loge du logographe, avec lequel il s’était entretenu familièrement pendant la séance : « Ce que vous faites là n’est pas très-constitutionnel, lui dit le roi d’un ton d’ironie qui contrastait avec la solennité de la circonstance. — C’est vrai, Sire, répondit Coustard, mais c’est le seul moyen de sauver votre vie. » Et il vota contre le roi en s’entretenant avec l’homme.