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tion de nous sauver ! Osez jurer que vous sauverez l’empire, et l’empire est sauvé ! » Ces voix imploraient comme on ordonne.

Les Girondins, indécis jusque-là entre l’abaissement et la chute du trône, sentirent qu’il fallait ou le précipiter eux-mêmes ou être entraînés avec lui. Vergniaud laissa la présidence à Guadet, pour que l’Assemblée, pendant son absence, restât sous la main d’un homme de sa faction. La commission extraordinaire, où les Girondins avaient la majorité du nombre, de l’importance et du talent, s’assembla séance tenante. La délibération ne fut pas longue. Le canon délibérait pour elle. Le peuple attendait. Vergniaud prend la parole et rédige précipitamment l’acte de suspension provisoire de la royauté. Il rentre et lit, au milieu d’un profond silence et à quatre pas du roi, qui l’écoute, le plébiscite de la déchéance. Le son de la voix de Vergniaud était solennel et triste, son attitude morne, son geste abattu. Soit que la nécessité de lire la condamnation de la monarchie en présence du monarque imposât à ses lèvres et à son cœur la décence de la pitié, soit que le repentir de l’impulsion qu’il avait donnée aux événements le saisît, et qu’il se sentît déjà l’instrument passif d’une fatalité qui lui demandait plus que sa conscience ne consentait, il semblait moins déclarer la victoire de son parti que prononcer sa propre sentence.

« Je viens, dit-il, au nom de la commission extraordinaire, vous présenter une mesure bien rigoureuse ; mais je m’en rapporte à la douleur dont vous êtes pénétrés pour juger combien il importe au salut de la patrie que vous l’adoptiez sur l’heure. L’Assemblée nationale, considérant que les dangers de la patrie sont parvenus à leur comble ;