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III

Au moment où tout s’écroulait ainsi autour du trône, un homme, célèbre par l’immense part qu’on lui attribuait dans la ruine publique, chercha à se rapprocher du roi : c’était Louis-Philippe-Joseph, duc d’Orléans, premier prince du sang. Je m’arrête pour cet homme, devant lequel l’histoire s’est arrêtée jusqu’ici sans pouvoir discerner la vraie place qu’on doit lui donner dans ces événements. Énigme pour lui-même, il est resté énigme pour l’avenir. Le vrai mot de cette énigme fut-il ambition ou patriotisme, faiblesse ou conjuration ? c’est aux faits de prononcer.

L’opinion publique a ses préjugés. Frappée de l’immensité de l’œuvre qui s’accomplit, étourdie, pour ainsi dire, par la rapidité du mouvement qui entraîne les choses, elle ne peut croire qu’un ensemble de causes naturelles combinées par la Providence avec l’avénement de certaines idées dans l’esprit humain, et aidées par la coïncidence des temps, puisse produire à lui seul ces grandes commotions. Elle y cherche le surnaturel, le merveilleux, la fatalité. Elle se plaît à imaginer des causes latentes agissant dans le mystère, et faisant mouvoir de là, en cachant la main, les hommes et les événements. Elle prend, en un mot, toute révolution pour une conjuration ; et s’il se rencontre à l’origine, au nœud ou au dénoûment de ces crises, un homme principal à l’intérêt duquel ces événements puissent se rap-