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des vomissements convulsifs déchirent son estomac et sa poitrine. Les médecins, hésitant sur la nature des symptômes, se troublent ; ils ordonnent des saignées : elles paraissent apaiser, mais elles énervent la force vitale d’un prince usé d’excès. Il s’endort un moment, les médecins et les ministres s’éloignent ; il se réveille dans de nouvelles convulsions et expire sous les yeux d’un seul valet de chambre, nommé Brunetti, dans les bras de l’impératrice, qui vient d’accourir.

La nouvelle de la mort de l’empereur, d’autant plus sinistre qu’elle était moins attendue, se répandit en un instant dans la ville ; elle surprenait l’Empire dans une crise. Les terreurs sur la destinée de l’Allemagne se joignaient à la pitié sur le sort de l’impératrice et de ses enfants : le palais était dans la confusion et dans le désespoir ; les ministres sentaient le pouvoir tout à coup évanoui dans leurs mains ; les grands de la cour, n’attendant pas qu’on eût attelé leur carrosse, accouraient à pied au palais dans le désordre de l’étonnement et de la douleur ; les sanglots retentissaient dans les vestibules et sur les escaliers qui menaient aux appartements de l’impératrice. À ce moment cette princesse, sans avoir eu le temps de revêtir ses habits de deuil, apparut tout en larmes, entourée de ses nombreux enfants et les conduisant par la main devant le nouveau roi des Romains, fils aîné de Léopold : elle s’agenouilla et implora sa protection pour ces orphelins. François Ier, confondant ses sanglots avec ceux de sa mère et de ses frères, dont l’un n’avait pas plus de quatre ans, releva l’impératrice, embrassa les enfants et leur promit d’être pour eux un autre père.