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sur la terrasse des Feuillants, d’appeler les Suisses laissés à la caserne de Courbevoie, et de sortir de Paris avec la famille royale enfermée dans cette colonne de feu. Les serviteurs du roi, les femmes de la reine, la princesse de Lamballe, se pressant à toutes les fenêtres du château, avaient l’âme et les regards fixés sur la porte du Manége, croyant à chaque instant voir le cortége royal en sortir pour venir achever et utiliser la victoire des Suisses. Vain espoir ! cette victoire sans résultat n’était qu’un de ces courts intervalles que les catastrophes inévitables laissent aux victimes, non pour triompher, mais pour respirer.


XIV

Les coups de canon des Marseillais et les décharges des Suisses, en venant ébranler inopinément les voûtes du Manége, avaient eu des contre-coups bien différents dans le cœur des hommes dont la destinée, les idées, le trône, la vie, se décidaient à quelques pas de cette enceinte dans ce combat invisible. Le roi, la reine, Madame Élisabeth, le petit nombre d’amis dévoués enfermés avec eux dans la loge du logographe, pouvaient-ils s’empêcher de faire dans le mystère de leur âme des vœux involontaires pour le triomphe de leurs défenseurs et de répondre par les palpitations de l’espérance à chacune de ces décharges d’un combat dont la victoire les sauvait et les couronnait de nouveau. Cependant ils voilaient sous la douloureuse conster-