Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 10.djvu/352

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

théâtre, chapelle, statues, tableaux, musées, ressemblait au salon de la France plutôt qu’à la forteresse de la royauté. C’était le palais des arts dans une ville de liberté et de paix.

Des constructions lourdes, bourgeoises, sans élégance, s’étaient élevées depuis, sous l’influence du mauvais goût de Louis XIV, aux deux extrémités de ce palais des Médicis. Ces constructions contrastaient par leur masse disgracieuse, par leurs étages accumulés et par les toits disproportionnés qui les écrasent, avec l’architecture savante et logique de l’Italie, qui harmonise les lignes comme le musicien harmonise les notes, et qui fait de ses monuments la musique des yeux. Ces deux édifices massifs, réunis au palais central par deux corps de bâtiment surbaissés, s’appelaient, l’un le pavillon de Flore, l’autre le pavillon Marsan. Le pavillon de Flore touchait à la Seine et à l’extrémité du Pont-Royal. Le pavillon Marsan touchait aux rues étroites et tortueuses qui rattachaient le Palais-Royal aux Tuileries.

Un jardin immense, planté régulièrement d’arbres séculaires, rafraîchi de jets d’eau, entrecoupé de pièces de gazon où s’élevaient sur leurs piédestaux des statues de marbre, et de plates-bandes plantées d’arbustes et de fleurs, s’étendait, en largeur, des bords de la Seine jusqu’au pavillon Marsan, sur toute la façade du château, et en longueur depuis le château jusqu’à la place Louis XV, qui le séparait des Champs-Élysées. Les allées de ce jardin, longues et larges comme des pensées royales, semblaient avoir été tracées non pour les promenades d’une famille ou d’une cour, mais pour les colonnes de tout un peuple. Une armée entière camperait dans le seul espace compris entre le château et les arbres. Deux longues terrasses flanquaient ce