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quelques-uns des Girondins, une perversité froide, qui donne à l’ambition le masque du patriotisme, et qui, pour ramasser le pouvoir, l’avilit sous les insultes du peuple et ne le retrouve après qu’en débris.


XXVI

Tout se préparait dans les départements pour envoyer à Paris les vingt mille hommes décrétés par l’Assemblée. Les Marseillais, appelés par Barbaroux sur les instances de madame Roland, s’approchaient de la capitale. C’était le feu des âmes du Midi venant raviver à Paris le foyer révolutionnaire, trop languissant au gré des Girondins. Ce corps de douze ou quinze cents hommes était composé de Génois, de Liguriens, de Corses, de Piémontais expatriés, et recrutés pour un coup de main décisif sur toutes les rives de la Méditerranée ; la plupart matelots ou soldats aguerris au feu, quelques-uns scélérats aguerris au crime. Ils étaient commandés par des jeunes gens de Marseille, amis de Barbaroux et d’Isnard. Fanatisés par le soleil et par l’éloquence des clubs provençaux, ils s’avançaient aux applaudissements des populations du centre de la France, reçus, fêtés, enivrés d’enthousiasme et de vin dans des banquets patriotiques qui se succédaient sur leur passage. Le prétexte de leur marche était de fraterniser, à la prochaine fédération du 14 juillet, avec les autres fédérés du royaume. Le motif secret était d’intimider la garde nationale de Paris, de re-