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soi-même dans de telles agglomérations d’hommes. Danton le savait, et il y comptait.


VI

Bien que la présence de Panis et de Sergent, deux membres de la municipalité, donnât au plan la sanction tacite de Pétion, les meneurs se chargèrent de recruter en silence la sédition par de petits groupes pendant la nuit, et de faire passer les premiers rassemblements du quartier Saint-Marceau et du Jardin des Plantes sur la rive de l’Arsenal, au moyen d’un bac qui desservait seul alors la communication des deux faubourgs. Lareynie soulèverait le faubourg Saint-Jacques et le marché de la place Maubert, que les femmes du peuple viennent tous les jours fréquenter pour leur ménage. Vendre et acheter, c’est la vie du bas peuple. L’argent et la faim sont ses deux passions. Il est tumultueux surtout sur ces places, où ces deux passions le condensent. Nulle part la sédition ne l’enlève aussi vite et par plus grandes masses.

Le teinturier Malard, le cordonnier Isambert, le tanneur Gibon, artisans riches et accrédités, feraient vomir aux rues sombres et fétides du faubourg Saint-Marceau leur population indigente et timide, qui se montre rarement à la lumière des grands quartiers. Alexandre, le tribun militaire de ce marché de Paris, dont il commandait un bataillon, se tiendrait à la tête de son bataillon sur la place avant