Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 1.djvu/395

Cette page a été validée par deux contributeurs.
COMMENTAIRE


DE LA ONZIÈME MÉDITATION




Lisez Graziella, dans les Confidences. C’est la clef de ces vers.

J’avais vingt ans ; j’avais quitté Naples et la maison du pêcheur ; j’avais laissé sur le bord de cette mer la jeune fille que j’aimais. J’ignorais encore qu’elle fût morte de mon absence. J’étais à Paris, dans la dissipation et dans le jeu. Je me promenais un jour, seul, dans le jardin désert du Luxembourg, le long de ce petit mur à hauteur d’appui qui séparait ce jardin du terrain alors inculte des Chartreux. Je m’accoudai sur ce mur. Je cherchais des yeux la mer de Naples, du cœur l’image de Graziella. J’avais le pressentiment de sa mort sans savoir sa maladie. Je restai là longtemps, anéanti dans sa vision. Quand je me relevai, la pierre était tachetée de mes larmes. Je rentrai dans ma chambre, pour rêver et regretter plus seul. J’écrivis ces vers. Je ne passe jamais au Luxembourg sans m’approcher de ce petit mur, et sans regarder si le vent de tant de printemps et la pluie de tant d’hivers n’ont pas effacé toutes mes larmes d’enfant.