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MÉDITATIONS


C’est l’heure où, sous l’ombre inclinée,
Le laboureur, dans le vallon,
Suspend un moment sa journée,
Et s’assied au bord du sillon ;
C’est l’heure où, près de la fontaine,
Le voyageur reprend haleine
Après sa course du matin ;
Et c’est l’heure où l’âme qui pense
Se retourne, et voit l’Espérance
Qui l’abandonne en son chemin.

Ainsi notre étoile pâlie,
Jetant de mourantes lueurs
Sur le midi de notre vie,
Brille à peine à travers nos pleurs.
De notre rapide existence
L’ombre de la mort qui s’avance
Obscurcit déjà la moitié ;
Et près de ce terme funeste,
Comme à l’aurore, il ne nous reste
Que l’Espérance et l’Amitié.

Ami qu’un même jour vit naître,
Compagnon depuis le berceau,
Et qu’un même jour doit peut-être
Endormir au même tombeau,
Voici la borne qui partage
Ce douloureux pèlerinage
Qu’un même sort nous a tracé :
De ce sommet qui nous rassemble,
Viens, jetons un regard ensemble
Sur l’avenir et le passé.