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CHAPITRE V
AÇOKA LE CONSTANTIN DU BOUDDHISME

On a dit d’Açoka qu’il fut le Constantin du Bouddhisme. Il y a, en effet, beaucoup de traits de ressemblance entre ces deux princes. Tous deux ne furent point d’abord des modèles de loyauté, et d’humanité ; tous deux se convertirent dans des circonstances où ce changement était utile à leurs intérêts ; pour tous deux le zèle en faveur de la religion était en même temps une ligne de conduite politique. Tous deux convoquèrent un concile, surtout dans des vues politiques, et pesèrent sur ses décisions ; par leurs libéralités, leurs faveurs et leur protection plus ou moins autoritaire, ils lièrent jusqu’à un certain point la cause de la religion à celle de leur domination et de leur dynastie ; ils assurèrent le triomphe de la religion nouvelle, mais en même temps ils lui firent perdre une partie de sa modération, de sa simplicité et de son indépendance des choses de ce monde.

En détruisant le prestige et les ressources de revenus des Brahmes, en réduisant de plus en plus le pouvoir des princes des divers états dépendants, en multipliant jusqu’à l’excès par ses largesses, le nombre des couvents et des religieux, Açoka préparait, à son insu, une réaction des Brahmes et des princes tributaires ou assujettis et leur alliance sous la forme d’un parti national hostile aux Bouddhistes signalés comme les partisans antipatriotes de la dynastie étrangère des Mauryas. La défaveur des princes et l’antipathie populaire devaient avoir pour conséquence l’abandon d’une partie des couvents dont les Religieux trop nombreux n’étaient plus en totalité entretenus par la piété publique. La liaison de la religion au