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qu’un Chinois est très mal quand il cesse de fumer. Le père Hue et d’autres observateurs avec lui attribuent cette tranquillité à deux causes : 1° l’absence de sentiments pieux et tendres ; la séparation d’objets peu aimés n’a pas pour eux d’amertume et ils craignent peu la vie future. 2° Le tempérament flegmatique des Chinois. Les médecins des hôpitaux de Hong-Kong et de Shang-haï parlent tous avec étonnement de l’impassibilité des malades pendant les opérations les plus graves. Evidemment le système nerveux des Chinois est beaucoup moins sensible que celui des Européens ; s’il en était autrement, ils seraient fort à plaindre, car la question et les supplices sont atroces en Chine.

On n’y a jamais tenu en honneur les exploits guerriers. Aucun peuple ne célèbre autant les arts de la paix et surtout celui du laboureur. « Que de privations ! chante mélancoliquement l’homme du peuple soldat malgré lui, que de malheurs immérités depuis que j’ai dû porter les armes, cessant de suivre la charrue ! »

L’opinion publique est contraire à l’accroissement des armées ; partout on répète l’adage de Confucius :

« Pour chaque homme qui ne travaille pas, il en est un autre qui manque de pain. »

Et cependant ils sont très cruels dans leurs guerres, dans leurs insurrections, et dans leurs lois pénales. Les brigands et pirates Chinois commettent des cruautés inouïes, uniquement pour s’amuser de la vue des souffrances de leurs victimes. Les gens du peuple n’ont entre eux ni solidarité, ni cohésion, ni lien national ou patriotique. Quand nos soldats escaladaient les murailles de leurs places fortes, c’étaient des coolis chinois qui tenaient les échelles. Ils n’ont de commun qu’une certaine haine des étrangers que leur souffle leur gouvernement ; avant la prise de Pékin, c’était du mépris pour les barbares. Ce mépris disparaît par la connaissance qu’ils acquièrent peu à peu de la supériorité des Européens dans les sciences et les arts appliqués.

Ils ont à un très haut degré l’esprit d’association pour leurs intérêts, mais non pour la bienfaisance ou d’autres buts élevés souvent même cet esprit supplée pour son initiative à l’insuffisance de l’Administration chinoise.