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laquelle il pouvait s’accrocher avec quelque espoir de survie.

Le lendemain, commença à défiler ce triste cortège de charrettes, chargées du peu de ménage que les rescapés apportaient avec eux. Tout était chargé pêle-mêle sur les voitures, où les femmes avaient pris place. Les hommes suivaient à pied, la tête basse, comme des bagnards qui s’en vont expier leurs crimes. Eux au moins reçoivent un juste châtiment ; mais quel crime avaient donc commis ces braves colons pour être ainsi pourchassés de leurs demeures ? En s’éloignant, ils regardaient de temps en temps en arrière pour dire un dernier adieu à cette région naguère fertile, transformée en lac, duquel n’émergeait que le pignon de leurs maisons désertes.

Le dieu Progrès avait fait son entrée d’une manière tragique dans la belle région du Lac-Saint-Jean, ne respectant ni la propriété privée ni l’attachement au sol. Place au progrès ! Mort aux récalcitrants ! semblait être le motto cruel de ceux qui ne respectent rien, si ce n’est l’or.

III

Pendant que Hugh Drassel était encore à New-York, attendant pour s’embarquer, les journaux lui apprirent l’accident arrivé à sa fille. Des histoires fantaisistes étaient ajoutées aux manchettes