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berge, où il lui donna les premiers soins que requérait son état.

Quand elle eut donné signe de vie, André partit à pas précipités vers la demeure des Drassel avec son précieux fardeau sur le dos. La position d’Agathe sur ses épaules, lui fit restituer l’eau qu’elle avait avalée. Le médecin appelé en toute hâte, déclara qu’il y avait espoir de la sauver, quoiqu’elle fût encore inconsciente à son arrivée.

Madame Drassel était au désespoir, de cette mésaventure arrivée en l’absence de son mari. Que dirait Monsieur Drassel à son retour ? C’est elle qui essuierait les reproches, et quelle explication donner ? Elle n’allait pas en demander à André, et Agathe n’était pas en état de la renseigner. Comment expliquer cette fugue et cette coïncidence de la présence d’André au moment psychologique ? Mystère qu’elle ne pouvait éclaircir, mais dont son mari lui demanderait compte !

Au pays du Saguenay, les roches n’ont pas encore appris à parler, car celle sur laquelle Agathe s’était assise l’aurait bien avertie du danger. Par contre, si les pierres sont muettes, les langues sont bien déliées, et les imaginations, fécondes. Le haut commérage ne tarda pas à y voir un rendez-vous tragique, en un mot une affaire montée par le jeune aventurier, pour s’attirer les bonnes grâces de la famille. Quelques bonnes dames y voyaient une pêche miraculeuse aux millions, d’autres plus charitables, une simple légèreté de la part d’Agathe.