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Je disais donc que nous étions au terme de notre voyage. Tout allait pour le mieux, dans le meilleur des mondes. L’harmonie la plus parfaite régnait autour de nous et l’ouvrage avançait rapidement. Trois mois s’écoulèrent ainsi et, malgré la solitude qui nous entourait, le temps passait rapidement, lorsque je fus soudainement pris de douleurs intestinales atroces. D’après mes faibles connaissances médicales je constatai que je souffrais de l’appendicite, et je dus prendre le lit. Mes compagnons étaient tout découragés de me voir ainsi invalidé sans secours de médecin et sans remèdes. Dans ma condition, il m’était impossible de sortir du bois, vu les nombreux portages que nous avions à faire. Un sauvage s’était bien offert à me porter sur son dos, mais je ne voulus pas lui imposer cette fatigue.

— Moi connaît bon « lemède », dit un des guides. Mon père malade comme toi ! Moi guérit mon père.

— Si tu y peux quelque chose, Sawi, vas-y. Fais de ton mieux, je te récompenserai.

Le sauvage fronça les sourcils.

— Sauvage, pas besoin de récompense ; soigner bon maître pour rien. Moi content si bon maître revient mieux.

— Je n’insistai pas. Sawi qui, comme tous les sauvages, était herboriste, alla cueillir des herbes sauvages, enleva l’écorce de différents arbres et en fit un bouillon qu’il me présenta tout joyeux. Force me fut d’accepter ce breuvage qui, en effet, me procura quelque soulagement, au grand contentement de mon médecin improvisé ; mais le mal recommença plus violemment le lendemain.

Après avoir tenu conseil, nous décidâmes que les quatre aides et un sauvage retourneraient en canots d’écorce à Natashquan, pour aller chercher du secours en cométique aussitôt que la neige tomberait en assez grande abondance pour permettre de faire le trajet, et que j’attendrais leur retour avec l’autre guide.

Pour comble de malheur pour nous, l’été semblait se prolonger indéfiniment, là comme sur le littoral, ce qui