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— Il faudra les cueillir ! répondit Angéline, en baissant les yeux ; mais avec la permission de papa bien entendu.

— Et que dirait votre père ?

— Il vous dirait que c’est une pomme qui a perdu l’humanité, mais que les pommes de la Côte ne sont pas fameuses.

— Ah ! mais vous faites de l’esprit sans en avoir l’air ?

— Peut-être Jacques ? Mais c’est pour ne pas parler de choses sérieuses qui me tracassent.

— Angéline, si vous avez quelque chose qui vous inquiète, je suis prêt à vous écouter et, si je puis vous aider de mes conseils, vous savez avec quel plaisir je le ferai, car vous ne vous imaginez pas combien je vous aime.

— Votre bonté et votre indulgence me donnent confiance. Vous savez, je me méfie un peu de moi-même et je désire vous consulter sur un sujet qui me donne beaucoup à réfléchir et qui me cause beaucoup d’ennuis.

— Parlez, dit Jacques, je vous écoute.

— Vous n’êtes pas sans savoir que j’avais promis à mon père, lors de la mort de ma mère, de me consacrer entièrement aux soins de la famille ?

— Oui, je sais cela. Monsieur le Curé m’en avait averti et j’ai même consulté votre père à ce sujet.

— Et que vous a-t-il répondu ?

— Mon assiduité auprès de vous, vous est-elle une réponse satisfaisante ?

— Que vous êtes sage et grand, Jacques, et comme je vous aime, moi aussi !

— Alors que manque-t-il à votre bonheur ?

— Rien ! mais mon bonheur fait peut-être le malheur d’autrui ?

— Eh ! qu’y pouvez-vous faire pauvre amie ? Puis-je vous demander de qui il s’agit ?

— De mon amie Antoinette Dupuis, répondit timidement Angéline.

— Eh, en quoi votre bonheur peut-il nuire au sien ?

— C’est qu’elle vous aime, elle aussi.

— Vous a-t-elle chargée de me le dire ?