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En majorité, les habitants sont d’origine acadienne, descendant pour la plupart des Acadiens chassés de leurs villages et de leurs fermes par la cruauté anglaise et dispersés par toute l’Amérique du Nord.

Quelques-uns étaient venus s’échouer comme des épaves sur cette terre inhospitalière, et leur présence y fut longtemps ignorée ; sauf des missionnaires Oblats. Ceux-ci avaient précédé les Eudistes dans ces missions lointaines, toujours attirés par cette solitude qui, à d’autres, n’offre aucun attrait.


IV

LA FAMILLE GUILLOU


Angéline Guillou était l’aînée d’une famille de quatorze enfants. Pierre Guillou, père de cette nombreuse famille, né aux Îles-de-la-Madeleine, était venu en bas âge avec ses parents faire la pêche à la morue à la Rivière-au-Tonnerre. Ayant pris femme à cet endroit, il y avait fixé sa résidence et s’était construit une modeste habitation.

Quoique le prix de la morue ne fût pas très élevé à cette époque, il y en avait cependant en telle abondance que Pierre Guillou, qui était fort de santé, travaillant jour et nuit, se levant à deux heures du matin pour aller prendre position au large afin de profiter du lever du soleil, moment le plus propice à la pêche à la morue, ramant quelques fois trois ou quatre milles avant l’aube, revenait chaque soir, sa barque remplie de belles morues, dont quelques-unes pesaient jusqu’à cinquante livres, et même plus ; aussi avait-il réussi par son travail ardu à se procurer une modeste aisance.

L’hiver ne le surprenait pas en oisiveté ; car à peine la pêche finie, et prenant juste le temps nécessaire pour mettre ordre à ses affaires, sécher ses filets et préparer ses provisions pour la chasse, il partait en cométique aussitôt