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— Je vous laisse la tâche ingrate d’avertir ses parents. Je n’aurais pas le courage de le faire moi-même !

Quand Jacques Vigneault père reçut cette nouvelle, il n’en put croire ses yeux. D’abord il ignorait la disparition de son fils. L’absence de nouvelles de sa part lui avait bien causé quelque inquiétude ; mais, apathique de sa nature, il n’avait pas attaché une grande importance à ce long silence ; d’ailleurs ne lui avait-il pas dit de ne jamais s’inquiéter de lui, que son métier lui interdisait quelquefois d’écrire ? Au Jour de l’An, sa femme avait bien manifesté quelque inquiétude, mais il l’avait rassurée et on attendait toujours des nouvelles de l’absent.


XI


Le premier bateau qui partit de Québec après la réception de la lettre du curé portait Jacques Vigneault père. En arrivant à la Rivière-au-Tonnerre, il se présenta chez le curé qui l’accompagna chez les Guillou.

Une grosse larme coula des yeux d’Angéline, quand le curé lui présenta le père de Jacques.

— J’avais espéré vous connaître dans des circonstances plus heureuses, Monsieur Vigneault.

— Je vous comprends ma… ma… fille, dit en hésitant, et le cœur gonflé, le vieux pêcheur de la Baie des Chaleurs. Je suppose que vous avez des détails sur la mort de… mon… de notre Jacques.

— Voici toute la preuve que nous avons de sa mort, dit Angéline en lui montrant l’hélice et la boussole.

Pour toute réponse, le vieux pêcheur baisa amoureusement les précieux souvenirs qu’on lui présentait, puis les remit à Angéline.

L’âme de Jacques était si présente dans tous ces souvenirs, que la question primordiale, celle de la fortune du disparu allait être oubliée si le curé n’avait lui-même abordé la question, croyant à une certaine gêne de la part du père Vigneault.