Page:Lallier - Angéline Guillou, 1930.djvu/153

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 155 —

dextérité avec laquelle l’animal avait franchi l’obstacle, entraînant chiens et cométique après lui.

Comme il était humainement impossible de secourir les pauvres malheureux qui s’en allaient à la dérive, Fafard les regarda longtemps, la mort dans l’âme, et rebroussa chemin sans que le médecin s’éveillât, inconscient du danger qu’il avait couru. Fafard prit son chien par le cou et pleura quelques instants le malheur des pauvres désemparés, pendant que l’intelligent animal manifestait, par des signes de contentement, sa joie d’avoir assuré le salut de son maître.

Cette mégarde ayant retardé les voyageurs, ils durent coucher en chemin. Fafard prodigua maintes caresses à son chien qui les avait sauvés d’une mort certaine, et le médecin ne fut pas insensible à l’intelligence de l’animal, car il faillit vider son sac de provisions pour le donner à Fidèle, qui avait l’air de comprendre le pourquoi de cette manifestation et se tenait fièrement campé sur ses deux pattes de devant en face de son maître, pendant que les autres chiens dormaient profondément après s’être repus de leur morue sèche.


IX


Dès l’aube, les voyageurs se remettaient en route et, à neuf heures et demie du matin, ils étaient en face de la résidence des Guillou.

Le médecin se hâta de pénétrer auprès de la malade qu’il trouva dans un état très critique. Elle n’avait pas repris connaissance durant les sept jours qui s’étaient écoulés entre le départ du cométique et l’arrivée du médecin.

Le bon curé qui craignait qu’elle ne mourût d’un moment à l’autre, lui avait administré les derniers sacrements par mesure de prudence.

La garde-malade ne l’avait pas quittée un instant, excepté pour faire des visites d’urgence aux malades.