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Par un beau matin de janvier, où une froide bise fouettait la figure, Angéline se rendit à l’église malgré une indisposition. À son retour de la table sainte, elle s’affaissa tout à coup. On la transporta chez elle, où elle dut s’aliter.

La fièvre commença à la miner et elle devint bientôt inconsciente. Antoinette Dupuis déclara sa science épuisée et, après consultation avec son père et le curé, on décida de faire mander le médecin des Sept-ÎIes.

Ce n’était pas une mince affaire que de faire soixante-treize milles pour aller chercher le médecin et en faire autant pour le reconduire ; ce qui faisait une distance totale de deux cent quatre-vingt-douze milles à parcourir, dans un pays où il n’y a pas de chemin. De plus, les attelages de chiens étaient rares dans le bourg ; les uns étaient occupés au transport de la poste, pendant que les autres étaient partis pour les bois.

— Il y a bien André Picard, dit le curé, qui a un fameux bon attelage ; mais sa femme est en couche et très malade. Il a même songé à aller chercher le médecin pour elle : mais n’a pas osé la quitter.

Il y avait à Mingan, situé à dix milles de la Rivière-au-Tonnerre, un attelage de chiens fameux et un non moins habile conducteur dans la personne de Mathieu Fafard, sorti victorieux l’année précédente de tous les concours, au carnaval de Québec. Son chien de tête (leader), qui répondait au nom de Fidèle, jouissait d’une grande renommée et nombreux sont les actes d’intelligence que l’on mettait à son crédit.

— Vite, au bureau du télégraphe, dit le curé à Pierre Guillou.

Il rédigea à la hâte un télégramme, auquel Fafard répondit immédiatement qu’il acceptait la tâche et qu’il partirait incessamment pour la Rivière-au-Tonnerre. La tempête de neige qui faisait rage sur la Côte ne mit pas d’obstacle au départ de Fafard, qui aimait les entreprises hasardeuses.

Les cométiques de la poste étaient deux semaines en retard, à cause de la glace qui avait retardé l’arrivée du courrier à Godbout, de sorte que les perspectives du voyage