Page:Lallier - Allie, 1936.djvu/86

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 85 —

elle acceptait le monde tel qu’il était et non tel qu’elle eût voulu qu’il fût.

Il y avait tout de même quelque chose de changé au Canada. De mon temps, quand une femme avait le malheur de perdre son mari, toute la paroisse venait à son secours, si elle était dans le besoin. Les Canadiens avaient-ils déjà oublié les exemples des ancêtres, ou bien la politique avait-elle au Canada des exigences que moi, député au Parlement de l’Union Sud-Africaine, je ne connaissais pas ? C’était une énigme qu’il me faudrait déchiffrer tôt ou tard.

Je restai longtemps absorbé par cette pensée, méditant sur le sort d’Allie. Elle aussi semblait occupée à une pensée qui devait se rapprocher de la mienne. Je rompis le premier le silence.

— Allie, les émotions de cette journée ont été trop fortes pour moi. Je sens le besoin de me reposer. Je pense que toi-même tu dois être harassée de fatigue.

— Oui, je suis un peu lasse. Un peu de repos me fera du bien. Mais je ne puis te laisser partir sans te demander une nouvelle faveur.

— Laquelle ?

— Celle de ne dévoiler à personne ma situation.

— Sois tranquille ! D’abord, à qui en parlerais-je ? Pas à M. Latour, certainement ; encore moins à Mme Latour. D’ailleurs, je