Page:Lallier - Allie, 1936.djvu/83

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
– 82 –

M. Montreuil renouvelait sans cesse ses instances que mon père encourageait. Les nuits d’insomnie que je passai à raisonner le projet, à prendre une décision que je défaisais à mon lever, finirent par affecter ma santé. Affaiblie, découragée, je donnai enfin mon consentement.

Tu peux deviner ce que fut ma lune de miel ! Mais mon mari était si bon qu’à la longue je finis par me persuader que je l’aimais.

Il acheta une maison sur la rue Sherbrooke, à Montréal, dans le quartier le plus fashionable de la métropole. Nous dépensions sans compter, et je me pliais, par convenance, aux mondanités dont mon mari raffolait.

Marie, Olive et Jacques naquirent à intervalles réguliers. Je faillis mourir à la naissance de Jacques ; mais je m’accrochai à la vie avec toute la force du désespoir. J’avais maintenant trop de raisons de vivre ! Je concentrai toutes les fibres de mon cœur sur mes enfants, dont je voyais l’avenir tout en rose ! Ces rêves ne suffisaient-ils pas à mon bonheur présent ? Quant à moi, je n’avais qu’à me laisser vivre.

À quelque temps de là, une vacance s’étant produite dans le ministère, M. Montreuil fit poser sa candidature par ses amis. Un autre ayant obtenu le portefeuille, il en fut tellement désappointé qu’il en perdit le boire et le manger. La neurasthénie s’empara de lui et le terrassa en six mois. Ses affaires, qu’il avait né-