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Dans cette lettre, j’avais peut-être donné trop libre cours à mes sentiments débordants d’affection. Une âme isolée qui aspire à la sympathie a parfois de ces élans qu’il vaudrait mieux brider, pour les mieux maîtriser ; mais, invariablement, la bride glisse sur le cou et la fougue reprend son élan impétueux et renverse tous les obstacles.

Je reçus en réponse la lettre suivante :

Port-Joli, le 23 décembre 19..

Mon cher Olivier,

Sais-tu que j’ai éprouvé du chagrin en lisant ta lettre du vingt-cinq novembre, toute remplie d’affection, trop, peut-être ! Il ne faut pas oublier, cher ami d’enfance, ta situation irrégulière ! Tu n’en es pas responsable, mais tu dois en subir les conséquences !

C’est au prix de nombreux sacrifices que survivra cette amitié que les événements se sont chargés de raviver et qui est maintenant ma raison de vivre ! Je tremble à la pensée que je vivrai désormais si près de toi ! Oh ! ce n’est pas que je manque de confiance en toi ! C’est une simple inquiétude de femme, peut-être, mais qui me suit partout !

Cependant, ne vois pas dans ces réflexions un refroidissement des sentiments fraternels qui m’ont toujours unie à toi, même quand je te croyais perdu à jamais. N’y vois plutôt que la crainte naturelle d’une pauvre petite femme désemparée et qui craint pour sa propre faiblesse ! Si je ne connaissais la noblesse naturelle de tes sentiments, je dirais tout de suite non à toutes tes propositions ! Mais j’ai confiance en toi !