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a droit en naissant. Je reconstituais dans mon esprit la vie d’une enfant placée sous la surveillance d’une bonne, privée de l’affection maternelle, grandissant dans une atmosphère d’indifférence, au milieu d’un luxe excusable mais qui éloigne des vrais sentiments familiaux. J’ai relu Chantecler, au cours du trajet entre Montréal et Port-Joli, et je faisais des comparaisons entre la faisane et la poule de nos basses-cours. En même temps, je me figurais une autre scène, où la première, laissant là son petit grelottant de froid, ferait la cour au coq étranger, et où la deuxième aurait une couvée de poussins si considérable qu’ils devraient se battre pour s’abriter sous ses ailes. Je me disais : mes ailes maternelles sont assez grandes pour couvrir Cécile de ma protection, si seulement elle voulait venir s’y réfugier ! Ah ! je n’ai pas de lambris dorés à offrir à ta fille, mais j’ai dans mon cœur de mère une surabondance de chaleur dont elle pourra bénéficier !

— Allie, tu ouvres à mon âme des horizons inespérés ! Non, cette porte du paradis n’est pas hermétiquement close ! J’ai découvert une fissure par laquelle je pourrai pénétrer à l’intérieur ! Je te confie Cécile, qui retrouvera en toi une mère. Tu l’aimeras, à cause de notre bonheur perdu ! Peut-être pourrons-nous repêcher une parcelle de ce bonheur qui me pénètre déjà au point que j’en sens les doux