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Nous marchions ainsi depuis trois heures et je regardais souvent avec un œil d’envie le sac que portait si allègrement, sur son dos, ma compagne, et qui contenait notre déjeuner. Soudainement, elle fit halte sur le haut d’un talus, jeta son sac par terre et s’assit.

— Avez-vous faim ? me dit-elle en ouvrant le sac.

J’éclatai de rire, en lui répondant :

— Si une marche pareille n’est pas suffisante pour ouvrir l’appétit !

Ce fut à son tour de rire de mon air de ventre-creux.

— Pourquoi n’avez-vous pas parlé plus tôt ?

— C’est un peu gênant de demander grâce à une femme, fût-elle adorable !

— Vous n’auriez pas été le premier !

— Je n’en doute pas, et vous aviez bien raison de dire que je n’ai pas le pied d’un montagnard !

— Vous n’allez pas demander à retourner en arrière ?

— J’ai fait la guerre, Mademoiselle ! Je ne recule jamais ! lui répondis-je, un peu piqué.

— Vous avez pourtant été capturé par les Boers !

— Oui, mais pas en me sauvant ni en reculant. D’ailleurs, ce n’est pas une humiliation que de se rendre à d’aussi habiles guerriers, surtout quand le général est Français !