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naissance. Arthur Lachance, Monsieur Reillal… Mon épouse.

Je n’osai pas lui déclarer que j’avais d’abord pris son épouse pour sa fille. Je la saluai et m’installai à leurs côtés. Nous causâmes de toutes sortes de choses. Le petit monsieur, aux yeux fins, me raconta quelques-uns de ses exploits financiers. Il me décrivit, avec enthousiasme et fierté, comment il avait roulé tel antagoniste qui voulait lui barrer la route du succès, et comment, finalement, il lui avait arraché jusqu’au dernier sou. Comme pour tous les financiers véreux, tous les moyens en affaires lui étaient bons, pourvu que l’adversaire fût assez naïf ou assez faible pour s’en laisser imposer. Devenu veuf à soixante-dix ans, sa fortune, lui avait permis de se payer le luxe d’une jeune épouse, belle comme l’aurore, qui l’entourait de soins calculés, pour prolonger, autant que possible, la vie facile qu’il lui faisait. Une infirmière, dont la mission était de le surveiller constamment, était attachée à sa personne. La potion pour ses reins, le cordial pour son cœur, l’emplâtre pour soulager le rhumatisme de sa jambe gauche, le cautère pour calmer la douleur de son genou droit, tout était à point. L’une et l’autre femme avaient intérêt à prolonger la vie de celui qui, une fois disparu, bien qu’il n’apportât pas avec lui sa richesse, ne laissait qu’une modeste pension de mille dollars