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l’aimée, comme l’écho répercute dans le lointain le son de notre voix. Nous faisons nôtres ses deuils, comme elle se penche avec compassion sur nos douleurs. Nous éprouvons même un certain bonheur à partager ses peines, parce que nous croyons ainsi les alléger. Ni le temps ni l’espace ne peuvent altérer ces sentiments qui dorment au fond de notre cœur et qui s’éveillent aux charmes d’une voix caressante qui parle ou qui chante, sous l’effet d’un geste familier ou au hasard d’une rencontre.

J’ai pourtant aimé Cécilia d’un amour farouche, passionné ! Mon cœur a violemment vibré au simple son de sa voix ! Sa vue seule m’a maintes fois troublé ! Même dans les moments les plus tragiques de mon existence, quand mon cœur transpercé par les morsures de la jalousie semblait laisser couler mon sang goutte à goutte, je sentais en moi je ne sais quelle farouche passion qui m’attachait encore à elle ! Mais jamais, en sa présence, je n’ai éprouvé cette sensation de paisible bonheur, douce comme le zéphyr qui caresse nos fronts lorsque le soleil africain, ayant dardé tout le jour ses rayons enflammés sur nos têtes, se dérobe enfin pour laisser arriver jusqu’à nous les effluves caressants d’un souffle de vent frais venant de la mer.

La nature farouche et volontaire de Cécilia avait fait de moi presque un fauve, et je