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glorieusement sacrifié leur vie pour leur patrie respective, dormaient côte à côte leur dernier sommeil, les uns, loin des leurs, sur une terre étrangère, les autres, près de leurs foyers, peut-être, et non loin du lieu où ils avaient fait leurs derniers adieux à leurs épouses et à leurs enfants.

Le soleil levant nous salua à notre entrée en gare de De Aar, où le chemin de fer bifurque. Le train se remit bientôt en marche à travers cette campagne vallonneuse, jadis si fertile, dévastée par une guérilla de trois ans. Les cruautés d’une guerre sans merci, livrée par l’Angleterre, humiliée de la résistance opiniâtre d’un petit peuple de fermiers décidés à vendre chèrement leur peau, avaient laissé des traces profondes tout le long de la voie ferrée. Les maisons de ferme avaient toutes été incendiées, après que les femmes eurent été parquées dans les camps de concentration et que les troupeaux eurent été anéantis. C’était le no mand’s land africain !

Pour descendre du train, je décidai de revêtir mon costume militaire, sachant tout le prestige attaché à l’uniforme d’officier de l’armée anglaise. Puisque j’étais maintenant en territoire anglais, autant valait profiter des circonstances. Le train filait à une allure d’à peine vingt milles à l’heure, sur le narrow gage sud-africain, et Bloomfontein, ancienne capitale de