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— Nous verrons cela tout à l’heure ; si M. le curé ne prolonge pas trop sa visite, je continuerai mon récit.

Un journal à moitié ouvert gisait sur une table. Mon attention fut attirée par une manchette en caractères gras : Concours patriotique.

— Voici les réponses que nous avons reçues à notre dernière question : Que pensez-vous de l’avenir du français au Canada ? »

Les opinions les plus variées y étaient exprimées, et je pus constater, avec un chagrin mêlé d’inquiétude, que le Canada français compte un nombre incroyable de défaitistes. Le traditionnel « à quoi bon », marque infaillible des âmes veules et sans fierté, s’étalait avec impudence dans plusieurs des opinions exprimées par les concurrents. L’horizon borné de ces hommes à volonté gélatineuse, qui se tiennent pour battus avant d’avoir engagé la lutte, ne concorde pas avec les vastes horizons de la belle nature canadienne, où la France a tracé un sillon profond et laissé son empreinte encore vivante dans tous les cœurs bien nés.

À quoi bon ? Si les soixante mille colons abandonnés par la France sur les bords du Saint-Laurent avaient ainsi jeté le manche après la cognée, il y aurait belle lurette que le verbe français serait disparu de la terre canadienne. Heureusement que la majorité de nos gens ont exprimé leur volonté de vivre !