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Non, l’existence de la patrie n’est pas liée à l’existence d’un homme.

Non, le temps est passé des sauveurs, des hommes providentiels et des hommes indispensables.

Mais s’il n’y a pas d’hommes indispensables, il a des hommes utiles. Et les hommes utiles sont surtout ceux qui, placés dans des situations importantes, ont su faire dignement leur devoir. Que le pays leur en ait de la reconnaissance, il faut s’en féliciter : c’est le contraire qui serait déplorable. Qu’une grande popularité s’attache ainsi à leur nom, surtout quand il y va de l’existence nationale elle-même, c’est l’indication d’un profond sentiment de patriotisme, et l’on doit s’en réjouir.

D’ailleurs, dans toutes les périodes de notre histoire, et surtout de notre histoire la plus récente, est-ce que le sentiment populaire n’a pas manifesté ses tendances en les personnifiant ? Est-ce que, pour ne parler que de ces dernières années, il n’y a pas eu des Gambettistes ? (Le président actuel du Conseil, tout récemment, se vantait à la tribune d’être un Gambettiste.) Est-ce qu’il n’y a pas encore, à l’heure présente, des Clémencistes, qui donnent ainsi leur adhésion à la politique de l’éloquent orateur de ; l’extrême-gauche ?

Cela veut-il dire que Clémenceau s’apprête à usurper le pouvoir suprême et que Gambetta ait caressé le projet de se faire proclamer roi de France ? En aucune manière.

Tant que l’éducation politique ne sera pas poussée à un degré de raffinement qu’on peut encore