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Monsieur,
Vôtre Travemunde, &c. 1694.
Monsieur,



LE vent de Sud-Est qui soufloit dans le temps que je vous écrivis ma derniére Lettre, nous conduisit jusqu’au Port de cette bonne Ville de Copenhague, ensuite il nous quitta pour aller porter le dégel aux Terres septentrionales de Suéde, où il étoit attendu depuis quelques jours. Ce petit trajet de Mer que nous fîmes en deux fois vint & quatre heures, me parut assez divestissnt ; car j’eus le plaisir de voir à Babord, c’est à dire à la main gauche, quelques Iles Danoises qui paroissent estre assez peuplées, s’il en faut juger par la quantité de Villages, que je découvris en rangeant ces Iles, d’un temps clair & serain, à la faveur d’un petit vent frais & modéré. Ce trajet me sembleroit un peu dangereux en temps d’hiver, à cause des bancs de sable, qui se trouvent en quelques endroits, car comme les nuits sont courtes, & les vents impétueux dans cette saison, je craindrais fort d’y échouer, malgré toute sorte de précaution. Dez-que j’eus mis pied à terre dans cette Ville-ci, les gens de la Doüane firent la visite de mes Valizes, où ils trouvérent plus de feüilles de papier, que de pistoles. Le lendemain de mon arrivée j’allai saluier Mr. de Bonrepaus qui étoit allé prendre l’air depuis quelque jours à la Campagne, pour le rétablissement de sa santé. Ensuite