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quipement des Vaisseaux de guerre qu’on bâtit annuellement prés de l’embouchûre de la Riviére. Je suis surpris que cette Ville ne soit pas mieux fortifiée, puisque c’est la seconde du Royaume. Les murailles de l’enceinte n’ont que six pieds d’épaisseur, & de distance à autre on découvre des Tours ruïnées, que le temps a dégradé. C’est un ouvrage des Mores, & même des plus irréguliers de ces temps-là. Jugez de là, Monsieur, s’il seroit dificile d’emporter cette Place d’emblée. Bien en prend aux Portugais que cette Province, qui est une des meilleures du Royaume, soit presque inaccessible à leurs Ennemis, tant par mer, que par terre. D’un côté à cause des barres, dont j’ay parlé, & de l’autre à cause d’une infinité de Montagnes impraticables. Elle est trés-bien peuplée. Toutes les Vallées sont pleines de Bourgs & de Villages, où il se receüille quantité de vin & d’olives, & où l’on nourrit un assez grand nombre de Bestiaux, & même la laine qu’on en tire est assez fine : je vous dis ceci sur le raport de quelques Marchans François, qui connoissent parfaitement bien cette Province là. On m’a dit qu’il est impossible de rendre la riviére de Duero navigable pour des Bateaux, à cause de quelques cascades & courans qui se trouvent entre des rochers éfroyables. Contentez vous de ceci, je n’en sçay pas davantage.

Le 10. je partis pour Lisbone, dans une Littiére que je louai dix huit mille six