de jours et de nuits où il avait rôdé oisif sans apercevoir le moindre gibier, les oiseaux de passage étant partis, les rats se cachant sous la terre gelée, les poules encore enfermées. Mais la famine de l’hiver n’était rien en comparaison des déceptions de cette journée.
Smirre n’était plus un jeune renard, il avait eu maintes fois les chiens à ses trousses et avait entendu les balles siffler à ses oreilles. Il était demeuré tapi, au fond d’un terrier pendant que les bassets rampaient dans les couloirs souterrains, bien près de le trouver. Mais l’angoisse qui l’avait étreint pendant la chasse harcelante n’était pas comparable à ce qu’il ressentait maintenant après chaque bond manqué.
Le matin, lorsque le jeu avait commencé, Smirre le renard était si beau que les oies en avaient été comme éblouies. Smirre aimait la splendeur : sa fourrure était d’un rouge ardent ; sa poitrine était blanche, son museau noir et sa queue opulente comme une plume d’autruche. Mais le soir de ce même jour, la fourrure de Smirre pendait en touffes enchevêtrées, il était baigné de sueur, ses yeux avaient perdu tout éclat, et sa langue sortait de sa gueule haletante d’où coulait de l’écume.
L’après-midi Smirre fut si las qu’il eut comme du délire. Il ne voyait partout que des oies en plein vol. Il bondit vers des taches de soleil qu’il découvrit par terre et vers un pauvre papillon éclos trop tôt de sa chrysalide.
Pourtant les oies sauvages ne se lassaient pas de voler par la forêt et de tourmenter Smirre. Elles n’eurent aucune pitié, bien que Smirre fût anéanti, tremblant, fou. Elles continuaient encore bien qu’elles