de ce qu’elle vivait dans une ville et ne voyait autour d’elle que des rues et des murs de maisons. Si elle s’installait à la campagne où elle verrait des forêts et des champs, peut-être le travail irait-il mieux.
Elle était du Vermland, et avait l’idée bien arrêtée de commencer son livre par cette province, et d’abord de décrire l’endroit où elle avait grandi. C’était un tout petit domaine, assez isolé du reste du monde, et où l’on avait gardé beaucoup de coutumes et d’usages anciens. Les enfants aimeraient peut-être à entendre raconter les travaux multiples qui, en son enfance, s’y succédaient d’un bout à l’autre de l’année. Elle voulait leur décrire comment on y avait célébré les fêtes : Noël, le jour de l’an, Pâques, la Saint-Jean ; comment étaient installés la cuisine, les magasins à provision, l’étable et l’écurie, l’aire et la maison de bain. Mais sa plume refusait d’obéir. Pourtant elle se rappelait toutes ces choses aussi nettement que si elle vivait encore dans le domaine. Mais si elle devait aller s’installer à la campagne, pourquoi ne ferait-elle pas une visite à cette vieille maison avant d’écrire ? Elle n’y avait pas été depuis plusieurs années, et n’était pas mécontente de trouver un prétexte pour y aller. Au fond, elle avait la nostalgie de cette terre partout où elle était dans le monde. Elle voyait bien d’autres endroits plus beaux, mais elle ne retrouvait nulle part cette sécurité et ce bien-être qu’elle avait connus dans sa maison d’enfance.
Cependant il n’était pas aussi facile d’y retourner qu’on pourrait croire, car le domaine avait été vendu à des gens qu’elle ne connaissait pas. Elle pensait certes qu’elle serait bien reçue par eux, mais il lui répugnait d’y venir en étrangère et d’être forcée de