— Pourquoi ne venez-vous pas ? Pourquoi trahissez-vous le soleil ?
— Nous n’osons pas. Nous craignons le grand engourdisseur qui demeure là-haut en Laponie, répondaient-ils.
Nils crut reconnaître bientôt qu’on avait pénétré en Laponie. Les rangs s’étaient singulièrement éclaircis. Le seigle, l’orge, le fraisier, les myrtilles, les petits pois, le groseillier étaient restés fidèles jusqu’ici. L’élan et la vache avaient marché côte à côte. Maintenant ils s’arrêtaient tous. Les hommes suivirent encore un bout de chemin, puis la plupart s’arrêtèrent. Le soleil aurait été presque abandonné si d’autres compagnons ne s’étaient pas joints au cortège : des buissons d’osier et une foule de petites plantes montagnardes, puis des Lapons et des rennes, des chouettes blanches, des lagopèdes alpins et des renards bleus.
Le gamin entendit tout à coup quelque chose qui avec fracas courait au-devant d’eux. C’étaient des fleuves et des ruisseaux qui s’échappaient en torrents.
— Qu’ont-ils donc à se sauver si précipitamment ? demanda-t-il.
— Ils fuient devant le grand sorcier engourdisseur qui habite les fjells, expliqua un lagopède femelle.
Soudain Nils vit se dresser devant eux une haute paroi sombre, au sommet crénelé. À la vue de ce rempart, tous reculèrent effrayés. Mais le soleil tourna vers le mur son visage radieux. Il apparut alors que ce n’était point un rempart, qui leur barrait la route, mais une montagne magnifiquement belle, dont les pics s’élevaient les uns derrière les autres, rougissant au soleil, tandis que les pentes étaient