visite au vieux roi et à la reine des cygnes. Ils l’avaient toujours reçue avec la distinction à laquelle avait droit un oiseau aussi notoire et qui avait tant voyagé. Cependant elle n’aimait pas à passer entre tous les cygnes qui formaient leur entourage. Jamais elle ne se sentait aussi petite et grise et humble que parmi eux, et sur son passage elle avait plus d’une fois saisi les mots « gueux » et « rustres ». Elle ne les avait jamais relevés, faisant semblant de ne rien entendre.
Cette fois tout semblait marcher à souhait. Les cygnes s’écartaient poliment, et les oies sauvages nageaient comme dans une allée où les grands oiseaux, blancs et soyeux, formaient la haie. Ils étaient très beaux lorsqu’ils gonflaient leur ailes comme des voiles pour en imposer aux visiteuses. Ils ne firent pas de remarques malsonnantes et étonnèrent Akka par leur bonne tenue.
« Le roi a dû se rendre compte de leurs mauvaises manières et leur enjoindre de se conduire poliment », pensa-t-elle.
Mais tout à coup les cygnes aperçurent le jars blanc qui nageait le dernier de la longue file d’oies. Un murmure de surprise et de dépit parcourut les rangs, et c’en fut fait des belles manières des cygnes.
— Comment ? s’écria l’un d’eux, les oies sauvages comptent donc porter des plumes blanches ?
— Elles ne vont pas s’imaginer qu’elles seront des cygnes pour cela ! renchérit un autre.
Et tous de crier à qui mieux mieux de leurs voix fortes et sonores. Impossible de leur faire comprendre qu’un jars domestique accompagnait les oies.
— Ce doit être le roi des oies en personne.
— Quelle insolence !