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le merveilleux voyage de nils holgersson

Karr

Environ douze ans avant le grand voyage de Nils Holgersson, il arriva qu’un propriétaire du Kolmârden voulut se défaire d’un de ses chiens de chasse. Il envoya chercher son garde, et lui déclara qu’il ne pouvait plus garder le chien : celui-ci ne cessait de chasser les moutons et les poules ; il devait en conséquence être emmené dans la forêt et fusillé.

Le garde prit le chien en laisse et se rendit à l’endroit où l’on tuait et enfouissait les chiens hors de service. Ce n’était pas un méchant homme, mais il était plutôt content de se débarrasser du chien, car il savait que l’animal ne chassait pas seulement les moutons et les poules et s’échappait souvent dans la forêt pour attraper un lièvre ou un jeune coq des bois.

Le chien, petit et noir, avait le poitrail et les pattes de devant jaunes. Il s’appelait Karr, et était si intelligent qu’il comprenait tout ce que disaient les hommes. Lorsque le garde l’emmena à travers la forêt, il se rendit très bien compte de ce qui l’attendait. Mais il n’en laissa rien voir. Il ne penchait la tête ni ne mettait la queue entre les jambes ; il paraissait aussi insoucieux que d’ordinaire. Ne traversait-on pas la forêt où il avait été l’épouvante de tous les petits animaux qui y demeurent ? « On serait content partout dans la broussaille, se disait-il, si l’on savait ce qui m’attend. » Il se mit à agiter la queue et à pousser un aboiement joyeux pour qu’on ne se doutât de rien.

Mais soudain il changea d’allure : il tendit le cou