De nouveau la Rafale le regarda d’un œil menaçant et lui ordonna de se taire, mais Fumle-Drumle intervint :
— Laisse-le donc. Les petits oiseaux vont croire que nous autres, corneilles, sommes devenues drôles et spirituelles.
— Ils ne sont pas si bêtes, dit le chef, mais cette idée lui avait probablement plu, car il ne réprimanda plus le gamin.
On volait le plus souvent au-dessus de forêts et de petits bois, mais parfois on passait au-dessus de villages, d’églises et de petites maisons bâties à la lisière d’un bois. On aperçut un beau vieux domaine. La maison, adossée à la forêt et précédée d’un lac, était peinte en rouge ; elle avait un toit à pans coupés ; d’énormes érables entouraient la cour, et le jardin était rempli de groseilliers touffus. Un sansonnet s’était perché sur la girouette même, et chantait de toutes ses forces pour que la femelle qui couvait ses œufs dans un poirier pût entendre chaque note : « Nous avons de beaux petits œufs, chantait le sansonnet. Nous avons quatre beaux petits œufs ronds. Nous avons plein le nid de superbes œufs. »
Le sansonnet répétait sa chanson pour la millième fois quand les corneilles passèrent. Nils mit ses mains en cornet devant sa bouche et cria :
— La pie les prendra. La pie les prendra.
— Qui est-ce qui veut m’effrayer ? demanda le sansonnet en battant des ailes avec inquiétude.
— C’est Ravi-par-les-corneilles, qui t’effraie, cria le gamin.
Cette fois le chef des corneilles n’essaya plus de le faire taire. Au contraire. Lui et toute la bande croassaient de plaisir, tant ils étaient amusés.