terre sous un arbre touffu ; un faucon ne l’y eût point découvert.
Cinquante corneilles entouraient le gamin, tournant vers lui des becs menaçants.
— Maintenant vous me direz peut-être, corneilles, pourquoi vous m’avez enlevé ? dit-il.
À peine le laissa-t-on achever sa question ; une grande corneille siffla :
— Tais-toi. Sinon je te crève les yeux.
Nils dut obéir, car elle semblait bien résolue à mettre sa menace à exécution. Il resta donc assis à fixer les corneilles, tandis que les corneilles le fixaient.
Plus il les regardait, moins il les aimait. Leurs robes de plumes étaient terriblement poussiéreuses et mal soignées. Elles semblaient ne connaître ni bain, ni huilage. Leurs pattes et leurs griffes étaient enduites de boue desséchée ; aux coins de leurs becs il y avait des restes de nourriture. C’étaient des oiseaux bien différents des oies sauvages. Il parut à Nils qu’elles avaient l’air cruelles, avides, farouches et hardies comme des scélérats ou des vagabonds.
« Je suis tombé au pouvoir d’une bande de brigands », pensa-t-il.
À ce moment il entendit au-dessus de sa tête le cri d’appel des oies sauvages :
« Où es-tu ? Je suis ici. Où es-tu ? Je suis ici. »
Il comprit que ses compagnons de voyage le cherchaient, mais n’eut pas le temps de répondre ; la grande corneille qui paraissait le chef de la bande siffla à son oreille : « Songe à tes yeux ! » Nils ne put que se taire.
Les oies sauvages ne pouvaient savoir qu’il était si près d’elles ; après encore deux ou trois appels,