ne lui servait de rien : il était et demeurait un objet de risée. Le fait même qu’il appartenait à une très noble famille ne le protégeait pas. En bonne justice il aurait dû être le chef de la bande, car depuis un temps immémorial cette dignité avait toujours appartenu à l’aîné des Plumes-Blanches. Mais dès avant la naissance de Fumle-Drumle, le pouvoir avait échappé à sa famille, et maintenant une corneille cruelle et sauvage le détenait. Elle s’appelait la Rafale.
Le changement de règne venait de ce que les corneilles avaient abandonné leur ancienne manière de vivre. Peut-être croit-on que toutes les corneilles vivent de la même façon. C’est une erreur. Il y a des peuples de corneilles qui mènent une vie honnête, c’est-à-dire qui ne mangent que des graines, des vers, des chenilles et des animaux déjà morts, mais d’autres mènent une vie de brigandage, attaquant les jeunes levrauts et les petits oiseaux et pillant tous les nids qu’ils peuvent trouver.
Les vieux chefs de la famille des Plumes-Blanches avaient été sévères et modérés ; tant qu’ils avaient conduit la bande, ils avaient forcé les corneilles à se conduire de façon à ne pas encourir le blâme des autres oiseaux. Mais les corneilles étaient nombreuses et la pauvreté était grande parmi elles ; elles s’insurgèrent contre les Plumes-Blanches et confièrent le pouvoir à la Rafale qui était le pire dénicheur de petits oiseaux et le plus méchant brigand qu’on pût voir, après toutefois sa femme, la Bourrasque. Sous leur règne, les corneilles avaient inauguré un genre d’existence qui les faisait craindre et haïr plus même que les éperviers et les grands-ducs.
Fumle-Drumle n’avait, bien entendu, rien à dire dans la bande. Toutes les corneilles s’accordaient à