verse la région et où l’on trouve des genévriers, des sorbiers et même quelques grands et élégants bouleaux. À l’époque où Nils Holgersson accompagnait les oies sauvages, on y voyait aussi une petite cabane entourée d’un lopin de terre défriché, mais les gens qui y avaient vécu, l’avaient abandonnée. La maisonnette restait vide et le champ inculte.
En quittant leur cabane, les gens avaient clos la cheminée, les fenêtres et la porte. Mais ils avaient oublié qu’un carreau d’une des fenêtres était brisé ; le trou était bouché d’un chiffon. En quelques années, les pluies avaient fait pourrir le chiffon qui céda un jour sous le bec d’une corneille.
En effet, la colline pierreuse du milieu de la lande n’était point aussi déserte qu’on aurait pu le croire : elle était habitée par un peuple nombreux de corneilles. Les corneilles n’y restaient pas, bien entendu, toute l’année durant. En hiver elles s’en allaient à l’étranger, en automne elles visitaient tous les champs du Götaland l’un après l’autre pour manger du blé ; en été elles se dispersaient et vivaient autour des fermes de Sunnerbo, se nourrissant de baies, d’œufs et d’oisillons ; mais tous les printemps elles revenaient dans la lande pour nicher et élever leurs petits.
La corneille qui avait arraché le chiffon de la fenêtre était un vieux mâle, nommé Garm Plume-Blanche, mais on ne l’appelait jamais que Fumle, ou Drumle, ou encore Fumle-Drumle parce qu’il était maladroit, faisait toujours des sottises et prêtait à la raillerie. Fumle-Drumle[1] était plus grand et plus fort que toutes les autres corneilles, mais sa force
- ↑ Fumla, drumla, s’y prendre maladroitement, agir en lourdaud.