de la grande papeterie de Munksjö ; après leur repas de midi, les ouvriers regagnaient en foule l’entrée de la fabrique ; eux aussi interrogent les voyageuses : « Où allez-vous ? Où allez-vous ?… — Là où il n’y a ni machines ni chaudières… — Emmenez-nous ! Emmenez-nous ! — Pas cette année ! répondit le petit garçon, pas cette année ! » Puis c’est la fabrique d’allumettes de Jönköping qui apparaît, vaste comme une forteresse ; par une fenêtre une jeune ouvrière se penche ; mêmes questions, mêmes réponses ; aux malades d’un hôpital, Nils apprend que le pays où il se rend ne connaît ni la souffrance ni la maladie ; aux enfants d’une école, qu’il ne redoutera, en cette lointaine patrie, ni livres ni leçons. Et tout le jour se poursuit le dialogue de la terre et des nuées, le colloque des hommes qui peinent et souffrent et de leurs vains désirs qui s’enfuient à tire-d’ailes dans le ciel du printemps.
À l’horizon de ce livre chatoie un fond magnifiquement poétique ; au premier plan, une ample comédie à cent actes divers captive l’attention des yeux trop faibles pour suivre le mystère des infinies perspectives ; que d’aventures, que de héros, quelle vive peinture des dix mille habitants de la forêt, de la lande, des marais et des grèves ! Quelle étonnante histoire naturelle en action ! Nils Holgersson est initié aux mœurs de la gent innombrable, ailée, emplumée, velue, qui plane, rôde, rampe, nage, propage l’infini frémissement de la vie parmi les campagnes sauvages, les bois illimités, les lacs, les fleuves et les mers scandinaves :