rappela que son grand-père avait parlé de ce bonhomme de bois, disant que les enfants de Karlskrona l’aimaient beaucoup. Nils comprenait bien cela. L’homme avait un si bon air d’autrefois qu’on lui aurait donné plusieurs fois cent ans. En même temps il semblait fort, crâne et joyeux comme on s’imagine que les gens étaient jadis.
À regarder le bonhomme de bois, Nils oublia presque l’autre qui le poursuivait. Mais voilà qu’il l’entendit tout à coup. Il entrait dans le cimetière. Il approchait. Où se cacher ?
À ce moment, Nils vit l’homme de bois se baisser et lui tendre sa grande et large main. Impossible de n’avoir pas confiance en lui : Nils sauta dans la main qu’on lui offrait. Et l’homme de bois l’éleva jusqu’à son chapeau et le glissa dessous.
À peine le gamin fut-il caché, à peine l’homme avait-il eu le temps d’abaisser son bras et de reprendre sa pose, que l’homme de bronze s’arrêtait devant lui, frappait le sol de son bâton et s’écriait d’une voix forte et sonore :
— Qui êtes-vous ?
Le bras de l’homme de bois remonta avec une précision qui fit craquer sa vieille charpente, ses doigts touchèrent les bords du chapeau et il répondit :
— Rosenbom, sauf votre respect, Majesté. Dans le temps, second maître à bord du vaisseau de ligne l’Intrépidité ; retraité, le service de guerre fini, comme gardien de l’église de l’Amirauté ; finalement sculpté en bois, et dressé dans le cimetière comme tronc pour les pauvres.
Le gamin eut un haut-le-corps en entendant l’homme de bois dire « Majesté ». En réfléchissant il comprit que la statue de la grande place représentait celui