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CHAPITRE II
LA NUIT DE NOËL

Sintram est le méchant maître des usines de Fors. Il a un corps de singe, des bras longs, la tête chauve, la face grimaçante. Il fait le mal comme on respire. Sintram ne prend pour valets que des coquins et des batailleurs, et n’a dans son service que des servantes querelleuses et menteuses. C’est lui qui excite les chiens jusqu’à la rage en leur enfonçant des aiguilles dans le museau, et qui vit heureux et content au milieu de gens haineux et de bêtes furieuses. Le grand plaisir de Sintram est de se déguiser en diable, avec des cornes, une queue, un corps poilu, des sabots de cheval ; et, — apparition subite surgissant des coins sombres, du grand four de cuisson ou du hangar à bois — il se réjouit d’effrayer les enfants peureux et les femmes superstitieuses. Sintram triomphe, quand il parvient à faire d’une vieille amitié une nouvelle haine, et quand il a empoisonné les cœurs de mensonges et de calomnies.

Or, la nuit de Noël, Sintram vint à Ekebu.

« Faisons entrer dans la forge le grand traîneau à bois ; amenons-le au milieu de la pièce et posons sur les montants des quatre coins le fond d’une vieille charrette !