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CHAPITRE XXV
LA FOIRE DE BROBU

Le premier vendredi d’octobre commence la grande foire de Brobu qui dure pendant huit jours.

C’est la fête de l’automne. On s’y prépare activement : on abat des bêtes, on cuit du pain dans chaque maison ; les tables restent servies toute la journée, les domestiques reçoivent double ration d’eau-de-vie, et le travail chôme. Les nouveaux vêtements d’hiver sont mis pour la première fois. Les serviteurs et les journaliers, qui ont alors touché leurs gages, discutent longuement sur ce qu’ils vont acheter à la foire. Des gens venus de loin s’avancent sur les routes, le havresac au dos et le bâton en main. Beaucoup d’entre eux amènent leurs bêtes, réduits par la misère à les vendre au marché ; de jeunes taureaux et des chèvres, qui refusent d’avancer et se rebiffent, les jambes raides, barrent souvent le chemin.

Le premier jour de la foire, quel fourmillement sur les pentes de Brobu et au milieu du bourg ! On a dressé des boutiques où les marchands des villes étalent leur marchandise, tandis que les Dalécarliens et les paysans de la Vestrogothie empilent leurs pièces de toile sur des rangées de planches. Devant les échoppes, les jeunes gens essayent de persuader à leurs bonnes amies d’accepter le livre de cantiques et le fichu de soie ; et les parents choisissent des cadeaux pour les enfants qu’on a laissés au logis.