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vint à Ekebu et l’unit à Gösta Berling. Il n’y eut aucun apprêt de noces. On donnait un père à l’enfant : rien de plus.

Deux jours après le mariage, l’enfant fut emporté dans une convulsion. Mais la mère ne se repentit pas du sacrifice qu’elle avait fait pour ce petit être. Et l’idée de ce sacrifice atténua sa douleur.

Ces événements passèrent presque inaperçus. Quand on annonça les bans, la plupart des paroissiens ignoraient quelle était cette Élisabeth Ducker. Les pasteurs et les notables n’en parlaient pas, de crainte que la conduite de la jeune femme ne fût mal interprétée. Il est même curieux de voir combien les vieilles gens sont timides et réservés à son endroit et semblent appréhender qu’on en dise du mal.

Puis un autre événement éclipsa le mariage de Gösta : le Commandant Samzélius mourut.

Il était devenu de jour en jour plus farouche et plus sauvage. Il ne fréquentait personne et, retiré du monde, vivait à Siœ entouré de toute une ménagerie. On commençait à le redouter extrêmement, car il se promenait toujours avec son fusil chargé et tirait souvent au petit bonheur. Il blessa ainsi un de ses ours apprivoisés, et la bête furieuse lui broya le bras entre ses crocs et se sauva vers la forêt. Le Commandant mourut de ses blessures.

Si la Commandante l’avait su, elle aurait pu revenir à Ekebu. Cependant les Cavaliers ne l’attendaient pas avant la Noël, car ils étaient persuadés qu’elle ne reparaîtrait pas, que leur année ne fût écoulée.