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Cela se passa vers 1820, dans une commune éloignée du Vermland occidental. Ce fut le premier malheur qui toucha Gösta Berling ; ce ne fut pas le dernier, car ces poulains trouvent la vie dure qui ne supportent ni le fouet ni l’éperon. Au premier aiguillon de la douleur, ils s’emballent sur des chemins sauvages qui mènent aux précipices. Dès que la route est pierreuse et le voyage dur, ils ne trouvent rien de mieux à faire que de renverser leur charge et de courir en folie.

II
LE MENDIANT

Par une froide journée de décembre, un mendiant gravissait la pente de Brobu. Il était vêtu de guenilles sordides, et, dans ses chaussures usées jusqu’à la corde, ses pieds étaient trempés de neige.

Le Leuven est un lac étroit et long du Vermland qui, à deux reprises resserré et comme étranglé, s’allonge au nord jusqu’à la forêt finoise, au sud jusqu’à l’immense lac de Vœnern. Des communes étendues sur ses bords, la plus grande et la plus riche est celle de Bro. Elle occupe une bonne partie des rives de l’ouest et de l’est : mais c’est à l’ouest que se trouvent les plus beaux domaines, Ekebu, Bjorne, célèbres par leur opulence, et le village de Brobu, avec l’auberge, la maison du tribunal, la demeure du bailli, le presbytère et le champ de foire.

Brobu est située sur une côte raide et escarpée. Le mendiant avait dépassé l’auberge, au pied de la colline, et maintenant il haletait dans la montée du presbytère.