Page:Lagerlöf - La Légende de Gösta Berling, trad. Bellessort 1915.djvu/227

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nèrent le ciel. Mais le sacristain n’avait pas entonné le dernier psaume que les premières gouttes de pluie battaient déjà contre les carreaux verdâtres. Tous les gens se précipitèrent dehors pour voir tomber l’eau. Et ils riaient, et ils pleuraient, et ils offraient leur tête au ruissellement de l’averse. Ah, que leur misère avait été grande ! Mais que Dieu est bon et miséricordieux !

Seul, le pasteur n’était pas sorti. Il demeurait à genoux, au pied de l’autel. Sa joie et son saisissement avaient été trop forts. Il avait rendu le dernier soupir.

CHAPITRE XXIV
L’ENFANT

L’enfant était le plus chétif petit être qu’on pût voir, rouge et ridé, pleurant toujours. Il avait eu des convulsions depuis sa naissance, ce petit égaré, qui était entré dans la vie six ou sept semaines plus tôt qu’il n’en avait le droit et qui semblait ne pouvoir s’y faire. Il pesait si peu que ce n’était pas la peine d’en parler. On avait dû le coudre dans une peau d’agneau. Il ne voulait ni se nourrir ni dormir. Personne ne comprenait ce qui le retenait à la vie ; mais il vivait.

L’enfant était né chez un paysan, à l’est du Klarelf. La mère y était venue chercher du travail au commencement de juin. Elle avait dit au maître qu’elle avait eu un malheur et que la dureté de ses parents l’avait forcée de se sauver. Elle s’appelait Élisabeth Karlsdotter, mais elle ne voulait point dire d’où elle était. Elle ne demanda pour