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parc de minces bouleaux aux troncs blancs élancés, qui se disputent la lumière du ciel. C’est dans ce parc, alors jeune et riche de verdure, que la mort se glissait et se cachait pendant le jour ; mais la nuit elle se montrait à la lisière, toute blanche, sa faulx étincelant à la clarté de la lune.

En ce temps-là, l’amour habitait ce parc. Les vieilles personnes se plaisent à raconter comme les amoureux y cherchaient le silence et la solitude. Encore aujourd’hui, lorsque je passe devant Berga en maugréant contre les côtes et la poussière, ce parc aux troncs blancs et fins me réjouit par tous les souvenirs qu’il évoque de jeunesse et d’amour.

Mais en ce mois d’août, la mort s’y tapit, et les bêtes nocturnes la sentirent. Soir après soir, les gens de Berga entendirent glapir le renard ; et dans le pommier, sous la fenêtre de la capitaine, le hibou poussa ses ululements. La couleuvre rampa le long des allées de sable jusqu’à la porte de la maison, et l’on ne peut guère se tromper sur ce qu’annonce cette silencieuse messagère.

Et il arriva que le juge de Munkerud, qui revenait avec toute sa famille du presbytère de Bro, aperçut, dans la maison de Berga, vers deux heures du matin, une chandelle qui brûlait à la fenêtre de la chambre des hôtes. Et ceux qui l’accompagnaient distinguèrent nettement la flamme jaune et la chandelle blanche. Étonnés, ils parlèrent de cette lumière qui brillait dans la nuit d’été. Alors les gaies demoiselles de Berga rirent et prétendirent qu’on avait trop fêté la douce nuit au presbytère de Bro, car leurs chandelles étaient déjà finies au mois de mars ; et le capitaine protesta que personne n’avait couché dans cette chambre depuis des semaines et des mois. Mais sa femme se tut et pâlit : cette chandelle blanche ne s’allumait que lorsqu’une personne de sa famille allait mourir.

Peu de temps après, Ferdinand revint des forêts du nord, où il avait achevé son travail d’arpentage. Il en