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crieur s’arrêta dans l’air ; les plumes des scribes cessèrent de griffonner : on n’entendit plus une offre. Mais Melchior Sinclair se ressaisit :

— Eh bien, cria-t-il, ça ne marche donc plus ?

La vente recommença aussitôt.

Mme Gustava revint en pleurant dans la cuisine où Gösta l’attendait.

— Ça n’a servi à rien, dit-elle : je croyais qu’il terminerait cette atroce vente, quand il apprendrait la maladie de Marianne. Mais non ! Je suis sûre qu’il ne demanderait pas mieux ; seulement il a honte.

Gösta haussa les épaules et lui dit simplement adieu.

Dans le vestibule il croisa Sintram.

— Drôle d’histoire ! s’écria celui-ci. Gösta, tu n’as pas ton pareil pour nous défrayer de belles aventures !

— Ce sera encore plus drôle tout à l’heure, répondit Gösta. Le prêtre de Brobu est là, avec son traîneau plein d’argent. On dit qu’il achètera tout Bjorne et le paiera rubis sur ongle. Je voudrais voir le maître de forges quand il l’apprendra !

Sintram rentra la tête entre les épaules et rit intérieurement. Puis il se hâta vers la salle de vente, où il se faufila jusqu’à Melchior Sinclair.

— Veux-tu un petit verre, Sintram ? lui demanda Melchior. Mais le diable m’emporte si je t’en donne un, avant que tu aies d’abord acheté quelque chose !

— Maintenant comme toujours, tu as de la chance, mon compère, répliqua Sintram. Je t’annonce l’arrivée d’un homme de conséquence, qui, le traîneau chargé de bel argent, vient acheter Bjorne, meubles et immeubles. Il y a même ici un tas de gens qui achètent pour lui, car il ne tient pas à se montrer encore.

— Tu peux me dire son nom et je t’offre un verre.

Sintram but le verre, et prudemment se retira de quelques pas avant de répondre :